Bérose écrit:
«La première année (du règne d'Aloros ?) sortit de la mer un animal appelé
Oannès, selon ce que rapporte Apollodore.
Tout son corps était celui d'un poisson, mais sous sa tête de poisson surgissait une tête humaine, et des pieds semblables à ceux d'humains étaient sortis de sa queue de poisson.
Il avait aussi une voix d'homme. On en a préservé jusqu'à aujourd'hui une représentation. Il dit que cette bête passa de nombreux jours parmi les hommes, mais qu'il ne prenait pas de nourriture.
Il enseigna aux hommes l'écriture, les sciences et toutes les sortes d'arts. Il leur apprit comment fonder des villes, construire des temples, introduire les lois et mesurer la terre, et encore à semer et cueillir les fruits, et d'une manière générale tout ce qui faisait la vie civilisée, il le donna aux humains. Depuis ce temps, rien de nouveau n'a été découvert. Lorsque le soleil se couchait, l'animal aussi (faisait de même), Oannès retournait dans la mer, et passait la nuit dans ses profondeurs, car il était lui-même amphibie.
Par la suite d'autres bêtes semblables à lui sont apparues... Il dit qu'il fut un temps où tout était ténèbres et eaux, et que dans celles-ci des êtres monstrueux aux formes étranges vinrent à la vie.
Car des hommes naquirent avec deux ailes et certains avec quatre ailes et deux visages ils avaient un corps et deux têtes, ils étaient en même temps homme et femme, et ils avaient deux organes sexuels, masculin et féminin. Bérose continue de donner des descriptions de monstres, à jambes et cornes de chèvre, ou à sabots et jambes de cheval, et à corps humain, qui rappellent les aegipans et les centaures des mythes grecs.
Cet Oannès, héros civilisateur, n'est autre que le Sumérien U4.an.na, le sage connu par son surnom
d'Adapa. Il fait partie de ces créatures supérieures appelées par les Sumériens
ab.gal,
les "apkallu" des Akkadiens.Si, pour ce qui concerne la description que fait Bérose des temps primitifs, où les eaux et les ténèbres étaient confondues on retrouve l'influence des mythes de la Création suméro-Akkadiens, les hommes-poissons sont inspirés des sept sages, les apkallu, dont on a retrouvé de nombreuses représentations d'époque néoassyrienne. Pareillement, les sept sages sont aussi représentés sous l'aspect de personnages pourvus de quatre ailes. Oannès a, par ailleurs, aussi pu être identifié à Enki et à Ea , dont les prêtres, à une époque relativement tardive, sont représentés affublés d'un costume de poisson, les rendant semblables aux représentations d'apkallu.